Par Jacques Doutaz
Une pièce se trouve plongée dans l’obscurité. Soudain un rayon de lumière l’illumine. Que voyons-nous alors ? À l’évidence, plus que le rayon de lumière. C’est tout ou partie de la pièce qui se révèle à nous. La lumière ne se donne pas à voir ; elle donne à voir ce qu’elle illumine. Sitôt qu’elle est là, impossible de ne voir qu’elle : on voit tout sous un jour nouveau, par elle, en elle.
Il en va un peu de même pour l’Esprit. S’il ne passe pas inaperçu, c’est moins d’être lui-même perceptible que de rendre perceptible la réalité qu’il éclaire : par ta lumière, nous voyons la lumière (Ps 35,10).
On comprend dès lors que Jésus, à ses disciples, présente l’Esprit comme celui qui conduit dans la vérité tout entière (Jn 16,13), celui qui fait connaître et le Père et le Fils. Il est le jour qui dévoile ce qui, sans lui, nous échappe.
Mais l’Esprit est bien plus que cela.
Il va jusqu’à nous introduire dans l’intimité des relations unissant les Personnes de la Trinité. Par lui, nous n’épions pas « de l’extérieur », par voyeurisme, la circulation ininterrompue de leur amour réciproque. L’Esprit infusé dans nos cœurs nous fait participer à cette intimité, en aimant avec eux et en eux. L’amour divin est si parfait qu’il est inclusif : je suis dans mon Père, vous êtes en moi et je suis en vous (Jn 14,20).
Par l’Esprit, nous est donné, non seulement, de percevoir quelque chose de Dieu, dès ici-bas, mais aussi d’aimer Dieu « de l’intérieur ». Parce qu’il vient habiter en nos cœurs, nous pouvons laisser l’Esprit aimer le Père en nous, le laisser y murmurer Abba, Père (Ga 4,6) jusqu’à ce que les paroles du Fils deviennent nôtres, à l’image du Fils qui s’est fait nôtre pour que nous soyons siens.
L’Esprit ne se contente pas de nous éclairer. Il nous transforme.
Et puisque l’Esprit est Don, cette transformation vise à faire de nous des dons. Plus nous saurons recevoir, plus nous saurons donner. Recevoir. Donner. Donner. Recevoir. N’est-ce pas là, justement, le pouls de la Trinité ? Que notre cœur batte de ce pouls-là pour que Dieu respire en nous, par son Souffle…